samedi 20 juin 2009

Echauffements climatiques


Théâtre Fontaine
10, rue Pierre Fontaine
75009 Paris
Tel : 01 48 74 74 40
Métro : Blanche

Une pièce de Sylvie Audcoeur et Olivier Yéni
Mise en scène par Xavier Letourneur
Avec (par ordre d’entrée en scène) Martyne Visciano (Prudence Meissonnier), Jean-Marc Bidet (Dominique Bastien), Sylvie Audcoeur (Alexandra et Agnès Meissonnier), Sophie Le Tellier (Géraldine Bariani), Olivier Yéni (Nicolas Bariani)

Ma note : 6/10

L’histoire : Après avoir travaillé quinze ans dans un grand groupe pétrolier, Géraldine fait son « coming out » environnemental et entreprend un Mastère de Développement Durable. Pour réaliser sa thèse, elle impose à son mari Nicolas, plutôt sceptique, de s’installer dans une petit immeuble de centre ville appartenant à l’irréductible famille Meissonnier afin de le mettre aux normes. Géraldine est persuadée qu’elle saura les convaincre d’en faire un modèle de développement durable… D’abord totalement hermétique à ces nouveaux enjeux du 21è siècle, Prudence Meissonnier, propriétaire désargentée… mais soumise à l’ISF, réveillera très vite sa conscience éco-citoyenne et celle de ses nièces ; car, à la clé, il y a de nombreuses subventions…

Mon avis : L’action se déroule sur une placette située devant un petit immeuble parisien, vieillot et passablement dégradé… La première scène nous met immédiatement dans l’ambiance. Prudence Meissonnier, la séduisante propriétaire des lieux, effectue sa gymnastique en plein air, quand son locataire, Jean-Marc Bidet sort pour acheter ses croissants. Le jeune homme, sympathique et chaleureux, essaie poliment d’entamer la conversation. Mais la proprio s’obstine à l’ignorer. Diable, c’est qu’ils ne sont pas du même monde ! Même si le Bidet est prof de SVT de son état. Il ne s’en offusque toutefois pas, au contraire, il s’en amuse et, de nature facétieuse, il la taquine gentiment… Survient alors Alexandra, la nièce de Prudence, une jolie jeune femme qui occupe un des logements de l’immeuble. On comprend rapidement que sa libido gourmande l’a amenée à franchir les quelques mètres qui la séparaient du lit de son voisin de palier, notre aimable professeur, pas mal fait de sa personne au demeurant. Cette relation n’est guère du goût de sa tante qui leur a interdit, à sa sœur jumelle Agnès et à elle, d’adresser la parole
au(x) locataire(s)…

Hélas pour Prudence, cette charte rigoureuse va bientôt être mise en péril par l’arrivée d’un couple intéressé par un des appartements resté disponible dans l’immeuble, Géraldine et Nicolas Bariani… Géraldine ne cache pas son jeu. En l’absence de Prudence rentrée chez elle pour se changer, elle explique à son mari les raisons de son attrait pour cet immeuble un peu pourri : elle est là pour trouver matière à la rédaction de sa thèse destinée à lui permettre de décrocher son Mastère de développement Durable. Géraldine n’est pas une tendre. Autoritaire et tyrannique, c’est une véritable passionaria frisant l’intégrisme. Ecolo, mais pas cool. Et c’est en faisant miroiter de confortables subventions qu’elle va faire basculer en sa faveur une Prudence qui n’en justifie plus son prénom. Plutôt que de l’utiliser aux fins d’aménagements, cette manne inattendue va lui permettre d’éponger son ISF !

Echauffements climatiques est annoncée comme « la première comédie compensée carbone » et ce n’est pas là publicité mensongère. C’est même une pièce totalement en phase avec l’air du temps, intelligente, et qui nous met en face de nos propres responsabilités de citoyen lambda dans le domaine de l’écologie. Faire rire avec un tel sujet, vraiment sérieux, était une gageure que les auteurs ont plutôt bien réussie.
D’abord, la pièce est servie par un quintette de comédiens épatants. Leur amicale complicité, leur joie de jouer ensemble, sont communicatives. Chacun dans son personnage, parfaitement typé, est sans faille. Prudence est une femme totalement dépassée par les événements ; la rigidité qu’elle affecte n’est qu’attitude de façade et, visiblement, contre nature ; elle est un peu fofolle, gentiment évaporée et, sûre de son pouvoir de séduction, elle est un tantinet obsédée… Jean-Marc Bidet, on l’a dit précédemment, est l’individu le plus sympathique qui soit. Particulièrement conciliant, il déteste les conflits, il est d’office aimable avec tout le monde. Mais peut-être ne faut-il pas le maltraiter impunément car il est capable soudain de mettre les choses au point avec une vigueur inattendue… Géraldine, c’est l’intégriste-type, grande gueule, directive et péremptoire. Elle possède un abattage et une énergie véritablement dévastatrice… La première proie de cette prédatrice est automatiquement son mari, Nicolas. Mais s’il veut bien la suivre dans son délire environnemental, il ne se laisse tout de même pas marcher sur les pieds et il est capable de se rebeller… Alexandra Meissonnier, elle, est plutôt du genre psychorigide. Une vraie peau de vache ! Cassante et peu aimable, elle croit que son irréprochable plastique lui suffit pour mener son voisin de palier par le bout du nez et de certains autres organes. En réalité, c’est quelqu’un qui est mal dans sa peau et masque son manque d’assurance derrière une brutalité maladroite… Et puis il y a Agnès, sa sœur jumelle. Alors elle, elle est bien frappée. Déjantée, agitée, hyper-bavarde, exclusive, elle se livre à un moment à un numéro irrésistible de drôlerie, digne de la Zézette du Père Noël est une ordure…
Et là, je dois battre ma coulpe : me refusant systématiquement à lire les dossiers de presse ou les programmes pour ne pas connaître le contenu d’une pièce afin d’en préserver tout le sel, je n’avais donc pas noté que Sylvie Audcoeur tenait les deux rôles d’Alexandra et d’Agnès… Et bien tout au long de la pièce, tant elles sont dissemblables, j’ai cru qu’il y avait deux comédiennes. Complètement bluffé. C’est dire la performance réalisée par la jeune femme !

Maintenant, en dépit du bel abattage des comédiens et d’une mise en scène alerte et rythmée, de la présence cartoonesque d’Agnès, je ne peux pas dire que j’ai été transporté par cette comédie. Elle est peut-être justement trop intelligente et même, parfois didactique et un peu solennelle (surtout dans les propos de Géraldine). Mais pour être honnête, je ne me suis pas ennuyé, j’y ai pris souvent du plaisir et j’ai ri de bon cœur devant les facéties d’Agnès et à certaines répliques…
Je formule donc le vœu que cette pièce, qui a du fond et du sens et qui se veut louablement éco-citoyenne connaisse au niveau de la fréquentation un développement durable. C’est tout le mal que je lui souhaite…

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