lundi 17 mars 2008

Ne nous quitte pas


Théâtre des Mathurins
36, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 90 00
Métro : Havre-Caumartin/Auber

Une comédie de Gil Galliot et Yves Hirschfeld
Mise en scène par Gil Galliot
Avec Gil Galliot (la tête), Philippe Lelièvre (le sexe),Fred Nony (le coeur).
Voix off de Sophie Le Tellier

Ma note : 7/10

L'histoire : Une tentative masculine pour évoquer la Femme en toute... méconnaissance. Une comédie drôle et tendre sur la vision maladroite mais assumée de la vie de couple... Le postulat de base de cette pièce est plutôt alambiqué : Paul est un commercial marié depuis 18 ans avec Agnès, libraire. Les trois principaux éléments du corps de Paul, sa tête, son coeur et son sexe, commencent à s'affoler au moment où un rival, Jérémie, un séduisant et brillant écrivain, met leur couple en danger...

Mon avis : On met quelques minutes pour réaliser de qui il s'agit ; ou, plutôt, de QUOI il s'agit. Car les trois olibrius qui s'agitent devant nous et qui s'appellent tous les trois Paul ne sont pas des êtres humains. Ils représentent chacun un organe de ce fameux Paul, et pas n'importe lesquels puisqu'il s'agit - en allant de haut de bas - de sa tête, de son coeur et de son sexe... Mais dès qu'on a compris qui fait quoi, on se délecte tant chacun campe son organe avec une précision, des manies et des tics diaboliques. Le sexe en tête, ils s'en donnent à coeur joie !

La mise en scène est aux petits rognons (puisqu'on est dans les organes !). Succinte, mais efficace. De toute façon, avec des énergumènes qui occupent autant l'espace, nul n'est besoin de s'encombrer de décors et d'immobilier superfétatoires. Au début, trois valises suffisent amplement pour nous faire comprendre qu'il y a de la séparation et du départ dans l'air. A l'étage du dessus, Agnès est en plein désarroi. On l'entend sangloter. le signal d'alarme est déclenché. Chacun de nos lescars réagit avec sa propre personnalité. La tête a le don de rester en tout point rationnelle et pragmatique, avec toutefois une certaine condescendance envers ses deux collègues, apparemment moins nobles à son goût. Le sexe se comporte évidemment comme un gland, sans états d'âme, tellement sûr de son art et de ses talents, mais tout de même assez primaire, voire carrément couillon. Quant au coeur, fragile et hypersensible, il se met à palpiter et à pousser des petits cris à la moindre contrariété ; sa faiblesse chronique agaçant considérablement ses deux comparses.

Voilà, le tableau est brossé. Fous d'inquiétude à l'idée de voir Agnès larguer Paul, leur propriétaire, ils vont étudier quelle(s) stratégie(s) adopter pour la maintenir dans le giron familial.
Autre excellente astuce de la mise en scène, de temps à autre, une photo descend des cintres, concrétisant les pensées intimes d'Agnès. C'est ainsi qu'on fait connaissance avec Jérémie, le redoutable bellâtre dont Agnès commence à s'amouracher. Paul a tort, il devrait passer moins de temps au bureau...

Après un début relativement calme et rigoureusement construit afin de nous permettre de bien appréhender la situation, nos trois héros font progressivement monter la pression ; tout simplement en fonction de l'attirance grandissante d'Agnès pour Jérémie. Totalement désemparés par ce qu'ils appellent "l'énigmatique échaffaudage embrumé de la femme", ils s'évertuent à essayer de recoller les morceaux. Plus ils craignent de la voir céder, plus ils s'affolent, plus ils font n'importe quoi. Et quand on dit n'importe quoi, c'est vraiment n'importe quoi ! Et ça part dans tous les sens. Tous les genres sont abordés : la comédie musicale, le burlesque, la pantomime, le non sens, les costumes approximatifs. c'est absurde, farfelu, délirant, complètement déjanté, ça passe du coq à l'âne - ou plus précisément du coq au cheval (vous comprendrez) - et... totalement maîtrisé. Qu'est-ce qu'ils sont bons les gaillards ! Ce sont les dignes petits cousins des Monty Python

Cette pièce est fort bien écrite, parfois nécessairement pompeuse et cérébrale (ça c'est la faute à la tête !) et, surtout, elle est servie par une triplette d'acteurs absolument étourdissants. Très physiques, ils évoluent tous trois au même (très haut) niveau, tellement différents qu'ils en sont formidablement complémentaires. Leur complicité est communicative et le public se met bien vite à l'unisson de leur folie aussi créatrice que dévastatrice.
On peut dire qu'elle en fait des dégât, LA femme, dans les organes masculins les plus nobles et les plus intimes ! Il faut voir dans quel état elle les met...

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